Vieillir, un secteur d’avenir aux Antilles-Guyane ?
Tout est à faire dans la nouvelle filière de la Silver économie. Visite au cœur d’un secteur prometteur. – Texte Yva Gelin
Faciliter nos quotidiens c’est également pouvoir répondre aux problématiques de nos sociétés. Aujourd’hui dans la liste des divers défis s’inscrit la nécessité d’apporter des solutions à un phénomène nouveau, propre à notre époque et mondial : celui du vieillissement des populations.
Plusieurs conséquences se cachent derrière une population vieillissante : la baisse du nombre de travailleurs actifs, l’augmentation de l’âge moyen d’une population au travail, ou encore la hausse des dépenses publiques dans le domaine de la santé. Des impacts certains, mais pas pour autant négatifs. Cette population moins jeune a toujours des besoins et contribue à la vie économique industrielle et sociale d’un territoire. Toute la problématique est maintenant d’adapter les offres en fonction de cette nouvelle cible grandissante. L’enjeu est tel qu’il a donné naissance à une nouvelle filière : celle de la silver économie.
« La silver économie travaille à comment cette partie de la population peut continuer à vivre de façon autonome. C’est le nouveau paradigme du vieillissement. »
La filière de la silver economie regroupe la production d’innovations dans le but de répondre aux besoins de tous types de personnes qui avancent en âge mais également de ceux des personnes aidantes. Offres de services et produits qui vont chercher par exemple à rendre le domicile plus praticable, des moyens pour favoriser le lien social, maintenir une activité physique, ou encore faciliter l’accès au numérique. « C’est une filière très large, explique Nicolas Menet, Président de la Silver Valley (voir encadré). Nous travaillons sur le vieillissement certes, mais le vieillissement actif. C’est-à-dire que la silver économie travaille à comment cette partie de la population peut continuer à vivre de façon autonome. C’est le nouveau paradigme du vieillissement car il ne s’agit pas de trouver des solutions en fonction de ce que les personnes sont en incapacité de faire mais plutôt de fournir des services qui lui permettront de faciliter ce qu’elle est en capacité de faire. »
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La silver économie aux Antilles-Guyane
C’est officiel, d’ici 2050, la Martinique sera le département le plus vieux de France. La Guadeloupe bien qu’à un stade moins avancé n’est pour autant pas loin derrière et occupera la 6ème position. La Guyane quant à elle conserve encore une population jeune mais la capacité de logement des personnes âgées est déjà un défi majeur du territoire.
Avant de trouver des solutions, il faut comprendre le terrain. C’est dans cette logique que l’association des maires a commandé une étude sur le phénomène, « La Martinique face à une transition démographique sans précédent, fatalité ou opportunité à agir collectivement ? ». De ce rapport plusieurs enseignements sont mis en évidence, notamment la nécessité de renforcer l’attractivité du territoire pour les actifs, renforcer et faciliter l’accès des seniors à une offre sportive, culturelle et de loisirs en faisant la promotion du bien-vieillir. Une autre étude, cette fois en Guadeloupe, est en cours pour analyser comment les bailleurs peuvent s’adapter à la nécessité de créer plus de logements pour les personnes âgées.
« Les Antilles-Guyane sont généralement des territoires solidaires mais avec le départ des jeunes qui ne reviennent pas, il y a moins de personnes pour s’occuper des aînés comme ça pouvait se faire avant. »
Sandra Mirailh est membre du laboratoire DEMAIN à la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA), également ancienne directrice innovation chez un bailleur social pour personnes âgées et actuellement directrice de projet à Action Logement. Le premier point qu’elle nous apprend concernant les problématiques du vieillissement de la population antillaise est le lien avec le départ des jeunes. « Les Antilles-Guyane sont généralement des territoires solidaires mais avec le départ des jeunes qui ne reviennent pas, il y a moins de personnes pour s’occuper des aînés comme ça pouvait se faire avant. Les modes de vie changent et la solidarité arrive à son terme car il y a moins de jeunes. » Ainsi, pour elle, la question du logement avec la construction d’Ehpad est une des priorités.
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Autre problématique soulevée par Cécilia Chalono, infirmière en HAD (Hospitalisation à Domicile) en Martinique, est le manque d’anticipation. « Une personne qui devient dépendante physiquement et ou mentalement peut être prise en charge avant que la dépendance soit complète. Il est surtout important d’entretenir un lien social et une activité physique. Les centres d’accueil de jour ont été créés dans cette optique. Il s’agit aussi d’adapter le domicile, pour que l’individu conserve au maximum son aisance et ne se sente pas diminué dans son cadre de vie quotidien. »
Leila Arnaud, également infirmière en cabinet et en soins à domicile en Martinique met, elle, l’accent sur le manque de communication autour des aides et dispositifs existants. « C’est le milieu dans lequel je travaille et pourtant même pour moi il est compliqué d’avoir une vue d’ensemble sur ce secteur et chaque semaine je constate le calvaire que c’est pour les familles de s’organiser. »
De nombreuses offres sont donc à pourvoir dans le secteur de la silver économie aux Antilles. Les choix sont vastes pour l’entrepreneur de demain qui souhaite réaliser un projet dans ce secteur. Il peut d’une part répondre à une demande spécifique telle que la construction d’Ehpad ou tout simplement adapter son offre actuelle aux besoins de la silver économie. En témoigne Florian Pozzo, jeune entrepreneur, co-fondateur de l’agence de communication MADITEC :
« Lorsque j’ai un client qui propose des produits ou des services, mon objectif est de faire du développement d’entreprise et de lui permettre de mettre en place une stratégie de communication adaptée. En tant que professionnel avec un regard axé sur la silver économie, je peux lui faire prendre conscience qu’en changeant très peu de choses il peut également atteindre cette cible et que le tout est de communiquer sur les canaux qui leur correspondent avec un message plus adapté. Il ne s’agit pas de créer un tout nouveau produit mais surtout de retravailler le packaging ».
Les seniors, des consommateurs comme les autres ? Sans doute.
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La Silver Valley
Créée en 2013, la Silver Valley est un lieu d’innovation unique en Europe comprenant 4 500 entrepreneurs dont la spécialité est la longévité. Avec cette idée de mettre en place un lieu d’innovation dédié à la silver économie, la Silver Valley réunit d’une part les acteurs de ce domaine et d’autre part, en tant qu’expert, accompagne les entreprises souhaitant se développer dans cette branche. |
Idée d’ailleurs La Polynésie française a mis en place un dispositif pour encourager les membres de la famille à être les aidants en les payant pour prendre soin de leur proche. L’aidant « Feti’i », soit un membre de la famille ou un proche, est désigné par le bénéficiaire et est formé pour assurer les tâches de la vie quotidienne. L’aidant est reconnu et reçoit une indemnité mensuelle de 419 euros (50 000 Fcfp). Un dispositif qui encourage les liens familiaux. |
6 concepts de start-ups de la Silver économie 1. AÏNA est une entreprise de développement de gamme de produits innovants pour adapter les logements aux aînés. 2. Click and care est une plateforme de mise en relation et de coordination fondée par une équipe médicale. 3. Granny & Charly met en relation étudiants et personnes âgées pour des services de compagnie tout en simplifiant le processus d’embauche. 4. GoodMix crée et développe des solutions digitales intégrées de coaching et de recommandation diététique et d’activité physique adaptée pour la prévention et la gestion des maladies chroniques. 5. Lumeen est un dispositif médical innovant qui utilise la réalité virtuelle à des fins sociales et thérapeutiques auprès des personnes âgées en perte d’autonomie et dépendantes. 6. Tom & Josette est le premier réseau de micro-crèches intergénérationnelles. |