Faire du handicap au travail une cause commune
L’inclusion professionnelle des travailleurs handicapés et leur maintien dans l’emploi sont des enjeux majeurs. Pour être efficace, la réponse doit être collective et mutualisée. Rencontre avec Gaëlle Lacoma, inspectrice du travail à la DEETS.
Texte Lia Mancora – Photo Lou Denim
Quels sont les grands axes retenus par le Plan régional d’insertion des travailleurs handicapés ?
Ce Plan régional d’insertion des travailleurs handicapés (PRITH) est une dynamique en vigueur depuis 2009 à l’échelle nationale. En Guadeloupe, il est opérationnel depuis 2014. Avec le renouvellement de la convention-cadre le 18 décembre 2020, le partenariat s’est renforcé et regroupe : la DEETS(1), l’ARS(2), la MDPH(3), le conseil régional, le conseil départemental, Pôle emploi, Cap emploi, la Mission locale, l’AGEFIPH(4) et le FIPHFP(5), le rectorat, la CGSS(6). L’appui à la coordination est assuré par l’AGEFIPH. L’objectif commun est de capitaliser les retours d’expertise d’opérationnels de ces institutions afin d’accroître le taux d’emploi des travailleurs handicapés sur le territoire. La feuille de route, co-construite pour la Guadeloupe et les Îles du Nord, comprend quatre axes : l’accès à la formation et à l’alternance ; la mobilisation des employeurs ; le maintien en emploi et la prévention de la désertion professionnelle ; l’évaluation des actions conduites et la communication.
Associer handicap à compétences et performance renforce la cohésion sociale
Gaëlle Lacoma, inspectrice du travail, chargée de la politique d’inclusion professionnelle
des personnes en situation de handicap à la DEETS.
Quel est l’état des lieux en Guadeloupe en matière de taux d’emploi des personnes en situation de handicap ?
Rappelons que l’obligation d’emploi, à hauteur de 6 % dans les collectifs occupant vingt salariés et plus, existe depuis 1987 dans le privé et depuis 2005 dans le public. En cas de non-respect, l’entreprise doit s’acquitter d’une contribution. À ce jour, en Guadeloupe, ce taux reste faible : 2,71 % dans le privé et 3,73 % dans le public. Ces chiffres sont toutefois sous-évalués au regard de l’importance de la sous-déclaration. En Guadeloupe, 4 % des demandeurs d’emploi sont en situation de handicap. 80 % d’entre eux le sont devenus au cours de la vie, avec la prégnance des maladies chroniques évolutives ou lors d’un accident. Chacun devrait donc se sentir concerné car personne n’est à l’abri.
Pourquoi la sous-déclaration est-elle si importante ?
Dans le domaine du handicap, la solidarité familiale, très forte chez nous, peut indirectement, de manière non-intentionnelle, maintenir la personne en situation de handicap dans l’isolement et le déni. Cette situation l’empêche de se projeter dans un parcours professionnel. Pour changer la donne, des acteurs comme Pôle emploi et la MDPH sont intervenus dans les établissements scolaires en vue de sensibiliser parents, professeurs et élèves. Le but : anticiper la reconnaissance du travailleur handicapé. Car une fois acquise, des dispositifs d’accompagnement facilitent le parcours en alternance (dès 16 ans), en emploi (aménagement de poste) favorisant ainsi, une véritable inclusion professionnelle.
Quels sont vos moyens d’action pour sensibiliser les employeurs sur la question du handicap au travail ?
Des employeurs méconnaissent les dispositifs existants pour favoriser l’embauche et le maintien en emploi des travailleurs handicapés. Ils sont donc réticents à recruter ou licencient pour inaptitude médicale tout simplement. Il est donc primordial d’aller vers eux pour les sensibiliser, déconstruire les préjugés et les encourager à recourir aux compétences des travailleurs handicapés. Associer handicap à compétences et performance renforce la cohésion sociale. En cas d’aménagement de poste, l’employeur n’est pas seul : Cap Emploi mobilise des aides financières, techniques, humaines de l’AGEFIPH (privé) et du FIPHFP (public). Depuis 2020, nous sensibilisons notamment sur le maintien en emploi des travailleurs atteints de drépanocytose, de cancers, sur le handicap sensoriel. Également sur le handicap invisible qui concerne 80 % des travailleurs handicapés. Même si cela ne se voit pas, ces personnes souffrent de pathologies invalidantes qui les empêchent d’être aussi productives qu’une personne valide. Avec l’accompagnement du médecin du travail, de Cap Emploi, de la CGSS, ces personnes peuvent pourtant bénéficier d’aménagements de leur poste de travail et continuer à évoluer professionnellement. La réponse doit donc être mutualisée et collective.
(1) DEETS : Direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités
(2) ARS : Agence régionale de santé
(3) MDPH : Maison départementale des personnes handicapées
(4) AGEFIPH : Association nationale de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées
(5) FIPHFP : Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique
(6) CGSS : Caisse générale de sécurité sociale
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