Les avocats, partenaires essentiels du quotidien !

À société complexe, besoins multiples. Travail, famille, affaires personnelles... Les avocats sont des partenaires essentiels pour relever les défis juridiques du quotidien. Josselin Troupé, bâtonnier du barreau de Guadeloupe et des Îles du Nord depuis 18 mois, partage son expérience et sa vision.

Josselin Troupé, bâtonnier du barreau de Guadeloupe et des Îles du Nord - Credit Photo Lou Denim
Sarah Balay

« Notre métier fait encore peur, puisque nous intervenons souvent lors de situations dramatiques. Mais c’est loin d’être toujours le cas. »

Maître Josselin Troupé, bâtonnier de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy

BIO EXPRESS

Maître Josselin Troupé est bâtonnier de l’Ordre des avocats du barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy depuis le 1er janvier 2023, avec, à ses côtés, Maître Jean-Nicolas Gonand, vice-bâtonnier. Les deux années précédentes, il a lui-même occupé les fonctions de vice-bâtonnier de Maître Tania Bangou.

Avocat depuis juin 1996, il exerce en libéral sur la Guadeloupe, parfois dans l’Hexagone, au sein d’un cabinet généraliste qu’il partage avec ses associés, Maître Yannick Louis-Hodebar et Angebert Hodebar. Le droit de la famille (divorce) et le droit pénal sont au cœur de ses principales activités. Durant sa carrière d’avocat, Maître Josselin Troupé a également enseigné le droit pénal à l’université des Antilles et s’est investi dans l’accompagnement de ses confrères en tant que vice-président de l’union des jeunes avocats, puis en intégrant le conseil de l’Ordre. Le 1er janvier 2025, il passera le flambeau à Maître Marie-Michelle Hildebert, bâtonnière élue, secondée par Maître Pascal Bon. Sa devise : « Toutes les causes sont à défendre. Les défendre ne veut pas dire les excuser, mais leur donner un sens pour la survie même de la société ». 

Vous êtes bâtonnier du barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy depuis le 1er janvier 2023. Quelles sont vos principales missions ?

Josselin Troupé : Le bâtonnier est le porte-parole des avocats et représente le barreau dans tous les actes de la vie civile. Il gère également l’Ordre des avocats, véritable entreprise, dotée d’une direction et d’un personnel administratif. Garant de la déontologie professionnelle et de la discipline, il peut saisir le conseil de discipline et engager des poursuites à l’encontre d’un avocat pour non-respect des valeurs de la profession : dignité, conscience, indépendance, probité et humanité. Il reçoit et traite les plaintes des justiciables diligentées contre leur avocat qui donneront lieu ou pas à une saisine de l’assurance responsabilité civile professionnelle. C’est aussi lui qui procède à la désignation des avocats commis d’office.

Dans quelles circonstances les avocats peuvent-ils solliciter le conseil de l’Ordre ? 

Tous les avocats, une fois diplômés, doivent obtenir le consentement de cette instance pour s’inscrire au barreau. Les refus sont toutefois rarissimes. Le conseil de l’Ordre examine également les demandes d’admission au barreau par dérogation. Comme dans d’autres métiers, le système d’équivalence existe, mais pour devenir avocat sans le CAPA*, les conditions sont très strictes. Une candidature peut donc être refusée pour des questions de personnalité ou de comportement. Le conseil de l’Ordre est aussi indispensable pour porter la voix et défendre les plus jeunes avocats du barreau.

Selon vous, en cas de litige ou d’arrestation, il ne faut jamais refuser d’être assisté d’un avocat ?

Même dans des situations considérées comme perdues d’avance, le recours à un avocat est indispensable. Il dispose de ressources et maîtrise des procédures et techniques juridiques spécifiques qu’il utilise de manière opportune et stratégique pour surmonter les difficultés. C’est d’ailleurs dans ces cas-là qu’il est le plus utile. L’avocat est devenu nécessaire dans nos sociétés où les relations sociales sont devenues plus complexes. Des connaissances juridiques sont exigées au quotidien : pour un contrat de travail, pour construire sa maison, lors d’un achat important, d’un grand voyage, etc. Mais l’information ne suffit pas. L’avocat garantit un regard extérieur à la fois juridique, judiciaire et sociétal. Avoir le « réflexe avocat » est essentiel aujourd’hui avant d’engager une activité quelconque. Seul un professionnel du droit peut aider les justiciables à éviter certains pièges. Une simple consultation est parfois suffisante, mais un accompagnement plus ambitieux ne doit pas être exclu.

Vous indiquez être heureux de voir l’évolution que prend la relation au métier d’avocat, pourquoi ?

L’accès au droit se développe de plus en plus. Les mairies ouvrent régulièrement des PAD (Points d’accès au droit) où la population peut entrer en contact avec des avocats et obtenir gratuitement des conseils. Autre avancée : l’aide juridictionnelle, destinée aux personnes ayant des ressources limitées, est assurée de manière optimale au sein du barreau de Guadeloupe. C’est au bâtonnier que revient d’ailleurs la charge de désigner les avocats en fonction de leurs aptitudes et appétences. L’idée que cette aide aboutirait à une prestation au rabais est fausse, car nous disposons d’une main d’œuvre conséquente et suffisamment diversifiée pour que le système fonctionne bien. Les formalités pour obtenir cette aide ont même tendance à se simplifier grâce à la numérisation des démarches.

En quoi ce métier est-il injustement perçu ?

Notre métier fait encore peur, puisque nous intervenons souvent lors de situations dramatiques. Mais c’est loin d’être toujours le cas. Nous pouvons être sollicités pour de l’accompagnement et/ou du conseil simple. Cela permet d’éviter ou de mieux gérer certaines situations jugées graves. Par ailleurs, la liberté de fixation des honoraires est en réalité un gage d’équité dans la relation des avocats à leurs clients. La convention d’honoraires garantit que la prestation et son prix sont convenus d’un commun accord, rien n’étant imposé. Le client peut demander des explications sur les honoraires et recevra toujours une réponse justifiant la prestation. Cette obligation professionnelle est encadrée par une assurance responsabilité civile. Ainsi, consulter un avocat ne présente pas de risque, bien au contraire.

* CAPA : certificat d’aptitude à la profession d’avocat

Gestion des fonds par la CARPA
Sous la responsabilité du conseil de l’Ordre, la CARPA (caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats) reçoit les dépôts, organise et contrôle tous les maniements de fonds liés à l’activité professionnelle des avocats. Tout avocat doit déposer dans cette caisse les fonds qu’il détient pour ses clients, lors d’une transaction ou d’un procès gagné. Ces fonds sont conservés le temps des vérifications, puis la CARPA émet un virement ou un chèque aux bénéficiaires.

CHIFFRES CLÉS

  • 323 avocats inscrits au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, plus grand barreau d’Outre-mer.
  • 18 membres du conseil de l’Ordre administrateurs du barreau élus pour une durée de 3 ans.
  • 1 cour d’appel à Basse-Terre.
  • 2 tribunaux judiciaires, à Pointe-à-Pitre et à Basse-Terre.
  • 1 tribunal administratif à Basse-Terre.
  • 1 chambre « détachée » à Saint-Martin.

Bon à savoir

Nouveauté en garde à vue

Depuis le 1er juillet, la loi renforce les droits des personnes placées en garde à vue et fait suite à l’obligation de la France de se mettre en conformité avec le droit de l’Union européenne. Aucune audition ne peut désormais se tenir sans avocat. Le gardé à vue peut, « dès le début de la garde à vue et à tout moment au cours de celle-ci », demander à être assisté par un avocat désigné par lui ou commis d’office. La loi supprime le délai de carence de deux heures qui permettait jusqu’alors à l’enquêteur de commencer l’interrogatoire, même sans avocat, une fois ce délai expiré.

Concurrence déloyale

Le conseil juridique est une exclusivité du métier d’avocat. Il ne peut donc se faire qu’à titre occasionnel et sans rémunération spécifique si le « conseilleur » n’est pas avocat. Les officines qui proposent de conseiller juridiquement les justiciables sont illégales et n’offrent pas un service protégé par une assurance professionnelle réglementée. Le conseil de l’Ordre des avocats se charge de vérifier que le périmètre de la profession est respecté et peut engager des poursuites judiciaires à l’encontre des contrevenants.

Aide juridictionnelle et avocat commis d’office

L’aide juridictionnelle (prise en charge totale ou partielle des honoraires de l’avocat par l’État) s’applique suite à une demande du justiciable auprès du tribunal. Elle touche tous les domaines du droit et n’est attribuée que sur des critères de revenus et de situation patrimoniale. Un avocat commis d’office est désigné par le bâtonnier lorsque le justiciable n’en a pas choisi ou que l’urgence ne permet pas ce choix. Cette commission intervient en matière pénale (garde à vue, comparution immédiate, citation devant le tribunal correctionnel, cour d’assises…).

L’IA, menace ou opportunité ?

À ce jour, le risque pour la profession d’avocat de se voir remplacer par l’IA est fort limité. Lancée en décembre 2023, une application entendait, via un algorithme d’intelligence artificielle, rivaliser avec la profession d’avocat avec des tarifs défiants toute concurrence. Mise en demeure par le barreau de Paris, elle a été retirée des plateformes quelques semaines plus tard.

Ordre des avocats de la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint- Barthelemy

Maison de l’avocat, 12 rue Gambetta

97110 Pointe-à-Pitre