La valorisation énergétique des ressources biologiques : Un défi majeur pour les Outremers
Nicolas de Fontenay est Directeur des exploitations aux Antilles pour le Groupe Albioma. Partenaire historique de l’industrie sucrière, Albioma est l’acteur majeur de la production d’électricité “verte” dans les départements d’Outre-mer et à l’île Maurice. Point de vue d’expert sur l’avenir bioénergétique des Outremers.
Quels sont les “cœurs de métier” d’Albioma en matière d’énergies renouvelables ?
Nicolas de Fontenay : Albioma est un producteur indépendant d’énergie qui développe des projets dans la biomasse thermique, le solaire et la méthanisation. Depuis plus de vingt ans, Albioma a développé un savoir-faire reconnu dans la valorisation énergétique de la bagasse, ce résidu fibreux de la canne à sucre à fort pouvoir calorifique.
Notre Groupe est également un acteur majeur du photovoltaïque en Outre-mer. Notre parc de production d’électricité solaire est présent aux Antilles-Guyane, à Mayotte et à la Réunion.
Quels ont été vos points d’appui historiques sur le marché ultra-marin ?
Sur fond d’augmentation de la demande d’électricité en Outre-mer, un partenariat historique s’est mis en place avec les industriels du sucre pour mettre au point la première centrale bagasse-charbon au monde, sur la commune de Bois-Rouge à la Réunion – en 1992. Aux Antilles, la première installation mise en place – en 1998 – a été la Compagnie thermique du Moule (CTM), en Guadeloupe. Elle a fait sa première campagne sucrière en 1999.
Notre activité photovoltaïque a suivi, suite aux tarifs attractifs mis en place par le gouvernement de l’époque pour développer ce type d’énergie “propre”.
Quelle est la part des installations d’Albioma dans la production électrique globale en Outre-mer ?
Albioma est le leader de la production d’électricité Outre-mer aux côtés d’EDF. Aujourd’hui, via les quelque 440 000 panneaux solaires installés, nous produisons près de 32 Mégawatts dans les Antilles-Guyane (18 en Guyane, 12 en Martinique et 2 en Guadeloupe). Avec la Réunion, nous en sommes aujourd’hui globalement à 70 Mégawatts installés. Nos centrales bagasse-charbon assurent une production de base 24h/24 et toute l’année. En 2012, elles ont produit 57% de l’électricité de la Réunion et 35% de celle de la Guadeloupe. J’ajoute qu’à l’international, sur l’île Maurice, cette part représente 43%.
Sur quel modèle économique votre Groupe assied-t-il son développement ?
Le développement d’Albioma s’appuie sur un modèle créateur de valeur. En amont, l’approvisionnement en biomasse est sécurisé à travers des partenariats équilibrés avec les agro-industriels et agriculteurs. En aval, la fourniture d’électricité au réseau est garantie par des contrats de très long terme – 15 à 35 ans – avec EDF pour l’essentiel, sur la base d’un prix de vente indexé sur le coût d’achat des combustibles.
Pour vous donner un ordre d’idée : à partir d’une tonne de canne à sucre, l’industriel fournit 300 kg de bagasse à Albioma, qui produit 120kwh d’électricité pour le réseau, ainsi que 450 kg de vapeur pour le sucrier lui permettant de produire 115 kg de sucre. C’est un partenariat “gagnant-gagnant”.
Vos grands projets de développement, à terme ?
Nous entendons consolider nos positions Outre-mer en développant un modèle bagasse/biomasse se substituant progressivement au modèle bagasse/charbon, et alimenter avec le solaire une production d’énergie avec de hautes performances économiques et environnementales.
C’est tout l’objectif du projet Galion 2, en Martinique, qui devrait voir le jour en 2015. Cette centrale devrait, à terme, fonctionner avec la bagasse de la sucrerie du Galion, pendant la campagne sucrière, et avec de la biomasse importée du continent nord-américain (sous forme de pellets de bois), dans un premier temps, puis du Brésil, lorsque la filière sera mise en place.
Nous ciblons des marchés à fort potentiel de développement. La valorisation énergétique des ressources biologiques est un défi majeur pour les Outremers. Aux côtés de nos partenaires historiques, aux Antilles-Guyane, nous entendons le relever, et favoriser l’autonomie énergétique des territoires.