La Fabrique Décoloniale, un espace de dialogue et d’action pour repenser l’avenir martiniquais

Nadia Chonville, membre de la Fabrique décolniale et Zaka Toto, président fondateur © Jean-Albert Coopmann
Floriane Jean-Gilles, Alix Delmas

La fabrique décoloniale    

Créée en 2020 dans un contexte social électrique, La fabrique décoloniale investit l’espace public pour tenter de renouer avec la tradition du débat citoyen.

2020 : pandémie, couvre-feu, déboulonnage des statues, émeutes urbaines à Fort-de-France… La fulgurante montée de la violence en Martinique catalysait alors d’innombrables questions sociales sous-jacentes. « À ce moment-là », se souvient Zaka Toto, président et membre fondateur de La fabrique décoloniale, « nous étions à la croisée des chemins. Soit, nous trouvions les moyens de se parler, soit, nous courions à notre perte. Car cette violence interne ne débouchait pas sur une vision du futur partagée ou des propositions concrètes ». C’est à ce moment précis que l’idée de créer un espace de dialogue ouvert et apaisé prend racine : la Fabrique décoloniale est née.

La Fabrique est un collectif de chercheurs, artistes, écrivains, professeurs, agriculteurs, citoyennes et citoyens martiniquais, qui compte aujourd’hui 50 adhérents ou sympathisants, contre 15 en 2020. Son ambition est de faire émerger un chemin d’avenir fécond et pérenne : « fabriquer ensemble, renouer le dialogue, faire des propositions concrètes autour de l’idée de la décolonisation culturelle, économique et politique de la Martinique », poursuit Zaka Toto.

« Nous faisons de la politique non partisane, c’est notre force. »

Zaka Toto, président et membre fondateur de La fabrique décoloniale

« Faire réseau »

C’est cette vision qui fédère au sein de La fabrique décoloniale, au-delà des divergences d’opinions politiques ou des appartenances partisanes : collégialité est maître-mot. « Il y règne la liberté de s’exprimer dans un espace consacré », explique Zaka Toto. « Ce qui nous intéresse, c’est de travailler avec les gens et, par conséquent, cela a été la première étape de notre réflexion : trouver des endroits où tout le monde aura plaisir à se déplacer pour échanger. Il existe un vrai désir de faire réseau, on l’observe au sein des cénacles, par exemple. »

Conférence-débat, captation, podcast, l’impact du travail de La fabrique décoloniale autour de problématiques structurelles telle que la pollution au chlordécone, se mesure aujourd’hui à l’aune d’une visibilité grandissante, de sollicitations toujours plus nombreuses et d’une résonnance croissante, y compris sous d’autres latitudes.

« Nous faisons de la politique non partisane, c’est notre force. Nous travaillons avec plusieurs municipalités sur des projets culturels, une série d’ateliers et même deux festivals. Notre ambition est de proposer des rendez-vous plus récurrents qui rythmeront notre vie en société, en dépit, parfois, du manque de ressources financières ou humaines. Et si nous avons fait le choix de ne pas nous exprimer sur la vie chère pour le moment c’est parce que nous voulons y apporter des solutions concrètes. »

2025 s’annonce fertile. À la Fabrique, il se dit aussi qu’elle rime avec « réparation ».