GPMLM : Grand port, grands enjeux
Décryptage des stratégies à l’œuvre avec le nouveau président du Directoire du Grand port maritime de la Martinique (GPMLM), Bruno Mencé.
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Il nous faudra également faire preuve de résilience, nous sommes à la croisée des chemins, nous devons nous préparer au changement climatique.
Le GPMLM en 2025
Le Grand port maritime de la Martinique (GPMLM) connaît une phase intense de développement. De grands projets stratégiques sont en cours avec, notamment, la concrétisation du Hub Antilles doté d’un budget de 120 millions d’euros ; les travaux débuteront au premier trimestre 2025.
Pour piloter ces transformations d’envergure, un nouveau président du directoire vient d’être nommé cet été, Bruno Mencé. En fonction depuis le 1er septembre, l’homme n’est pas un inconnu pour la communauté portuaire. Directeur d’exploitation du GPMLM de 2015 à 2021, il rentre à quai après une escale de 3 ans comme directeur des opérations de l’aéroport Aimé Césaire. Dans ses bagages, « des réglementations et méthodologies en matière de sûreté et de sécurité aéroportuaire » dont il compte « s’inspirer tout en se saisissant de l’opportunité de transformation que représente le Hub Antilles », explique-t-il quand on l’interroge sur la façon dont ses deux expériences se sont nourries mutuellement.
Passer le cap
De l’expérience, il en faut pour mener à bien les nombreux défis, hormis le Hub Antilles, que sont la neutralité carbone d’ici 2050 fixée par l’OMI (organisation maritime internationale), la performance logistique ou encore la création de valeur sur le territoire pour lequel le port joue un rôle moteur. « Le port de demain doit être performant, ouvert sur la Caraïbe, ce qui n’est pas encore suffisamment le cas aujourd’hui, un port moderne dans ses activités, ses services, qui a réussi sa digitalisation, sa transition écologique, énergétique, tout cela en maintenant un dialogue social de qualité indispensable », précise Bruno Mencé.
Une vision ambitieuse pour celui qui, 10 ans auparavant, a piloté le projet de restructuration du terminal de la pointe des Grives en mettant en place des outils d’amélioration de la productivité. « Un travail collectif qui a porté ses fruits », affirme-t-il, comme le développement de la croisière, autre axe important de son bilan comme directeur d’exploitation ; grâce notamment à des investissements déterminants pour les infrastructures du terminal des Tourelles et de la Pointe Simon.
Les balises sont au vert pour le GPMLM
Il est vrai que de nombreux signaux positifs jalonnent les onze jeunes années du GPMLM, fondé en 2013 dans la continuité de la réforme portuaire débutée dans l’Hexagone en 2008*.
En premier lieu, la reconnaissance en 2022 du port de la Martinique par la Banque mondiale comme le port français le plus performant, un titre qu’il conserve encore aujourd’hui. Autre distinction qui a son importance, la destination Martinique adoubée cinq années durant comme la plus sûre de la Caraïbe. Des indicateurs auxquels sont très sensibles les compagnies maritimes. Résultat : en 2015, la Martinique accueillait 40 000 croisiéristes par an, ils sont aujourd’hui 600 000. De grandes retombées économiques pour le territoire dont se félicite le président : « chaque euro investi dans la croisière génère un euro de valeur ajoutée pour le territoire, créant un cercle vertueux ». Des efforts de concert avec le comité du tourisme de Martinique qui ont payé, confirmés par le fait d’avoir réussi à positionner la Martinique comme une destination pour la croisière « tête de ligne », qui génère des retombées économiques quatre fois supérieures à celles des croisières en simple escale.
*Loi n°2008-660 du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire.
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Le GPMLM : un acteur clé de l’économie martiniquaise
Car le port est bien plus qu’une infrastructure maritime, il est un moteur économique et un acteur du rayonnement des Antilles. Le président du directoire du GPMLM le rappelle : « le port est un outil au service du territoire », avant d’ajouter que « nous aurons la création d’un levier extraordinaire qui n’existe pas encore, un poste de contrôle frontalier. Nous serons ainsi une porte d’entrée officielle de l’Europe, nous pourrons contrôler les produits de pays tiers sur un territoire reconnu européen d’un point de vue sanitaire et douanier ». Un hub pour toute la région des Caraïbes et le nord du continent sud-américain qui représente « une opportunité considérable pour les industriels et importateurs martiniquais », insiste-t-il.
À sa place
Bruno Mencé affirme sa volonté de renforcer le rayonnement régional du port et son intégration dans les grandes routes maritimes mondiales. Il conclut : « Il nous faudra également faire preuve de résilience, nous sommes à la croisée des chemins, nous devons nous préparer au changement climatique. Nous allons capitaliser sur notre cœur de métier qui est d’accueillir les bateaux mais la richesse du port viendra aussi de notre créativité à nous adapter ». Une vision moderne au service de la montée en puissance du GPMLM qui réside à la fois dans les portes qu’il ouvre sur le monde comme dans sa performance consolidée à la place stratégique qui est la sienne à l’interface entre l’Europe, les Caraïbes et l’Amérique.
*Loi n°2008-660 du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire.
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Grand port maritime de la Martinique
www.martinique.port.fr
0596 59 00 00
Les 4 priorités stratégiques du GPMLM
1. Le Hub Antilles
La décarbonation du secteur maritime au niveau mondial entraîne des bateaux de plus grosses tailles propulsés au GNL. Leur apparition implique l’adaptation des infrastructures du port et les nouvelles routes maritimes empruntées deviennent de nouvelles sources d’approvisionnement possibles pour les importateurs et industriels martiniquais. De même un projet de plateforme de transbordement sera créé. Le budget alloué est de 120 millions d’euros dont 70 millions pour l’extension des quais de 450 à 600 mètres linéaires, 38 millions pour l’acquisition de 2 nouveaux portiques ultra modernes. 3 sont déjà existants, l’un sera démantelé et les deux autres rehaussés pour un montant de 6 millions d’euros. 15 millions d’euros sont consacrés à la création en arrière quai de zones logistiques dédiées à la transformation, la réexportation et stockage ainsi que l’aménagement de 700 prises reefers (contre 400 auparavant). Les travaux démarreront début 2025 et vont se dérouler sur deux ans.
2. L’enjeu de décarbonation
L’OMI (organisation maritime internationale) a fixé un objectif fort : tendre vers la neutralité carbone à l’horizon 2050. Le projet Smart Grid permet l’installation de panneaux photovoltaïques au terminal à conteneurs de la Pointe des Grives qui réduiront de 50 % la consommation d’énergie fossile. Il s’appliquera dans un second temps au terminal croisière des Tourelles. Le chantier a démarré en décembre 2024 et sera livré en novembre 2025 pour un budget de 11 millions d’euros. Un système de livraison d’électricité à quai à partir du photovoltaïque est également prévu pour les navettes inter-îles ainsi que les plus petits bateaux de croisières. Des études de faisabilité de solaire flottant sont également en cours. Le GPMLM finance de nombreux projets de recherche pour une meilleure connaissance et préservation du milieu marin.
3. La Performance logistique ou comment diminuer le coût du dernier kilomètre
La digitalisation est essentielle. Grâce au projet européen eFTI4ALL porté par la CTM, les procédures papier sont éliminées pour fluidifier et sécuriser la chaîne logistique. Le GPMLM soutient également le développement de zones franches et de hubs logistiques pour encourager le dégroupage, l’exportation et stimuler l’économie locale.
Il s’agit également d’accroître la coopération régionale et la connectivité caribéenne par la création de lignes de cabotage. À cet effet, un investissement de 2,5 millions d’euros est prévu pour des travaux au port du Robert. Enfin, le développement des relations avec le PMAC (Port Management Association of the Caribbean) et la CSA (Caribbean Shipping Association) s’accélère et se renforce.
4. Le dialogue social
Les investissements et projets structurants à venir reposent à la fois sur une ingénierie, une orthodoxie financière et le maintien d’un dialogue social de qualité. Ce dernier est ainsi un axe de développement stratégique crucial, car il conditionne l’attractivité et la fiabilité des opérations. Cela nécessite d’accompagner les équipes dans les transitions à venir tout en valorisant la diversité des métiers et la culture portuaire.
Bio express
Bruno Mencé est né le 23 avril 1963 à la Martinique. Ingénieur de formation, il consacre une partie de sa carrière à l’industrie en dirigeant de grands groupes privés dans l’Hexagone et à la Martinique. À partir de 2015, pendant plus de 6 ans, il est le directeur d’exploitation du GPMLM avant de devenir le directeur des opérations de la SAMAC de 2021 à 2024. Nommé président du directoire du Grand port maritime de la Martinique par décret du président de la République le 3 juillet 2024, il est en fonction depuis le 1er septembre. Sa double expérience opérationnelle, entre ciel et mer, lui confère aujourd’hui les moyens de déployer une vision régie autour de 4 priorités stratégiques : le Hub Antilles, l’enjeu de décarbonation, la performance logistique et le dialogue social.