DOSSIER BIO : Produire bio, un mode de vie
Ils sont engagés, pointilleux et travailleurs, parce qu’ils veulent le meilleur pour leur environnement, pour leurs clients, pour leur conscience. Leurs produits garnissent les rayons des épiceries
diététiques et biologiques de Guadeloupe, et de certains supermarchés. Zoom sur des producteurs guadeloupéens qui ont fait du biologique un art de vivre.
Elin Losange, Lamentin : « Je mets en musique insectes, animaux et végétaux ».
Elin supervise les 4 hectares de culture biologique de la
société « SCEA Soleil des galbas ». Son cheval de bataille :
convaincre que l’on peut cultiver des produits propres et sains en étant économiquement rentable. Elin plaide pour la structuration de la filière bio en Guadeloupe, « qui manque d’usines et de coopératives pour gérer et faire croître la production existante ».
Avec sa compagne, il pratique l’élevage et une polyculture adaptée à son environnement et à son sol, en autosuffisance en terme de fertilisants, issus des déjections animales et des déchets d’exploitation (herbes, restes de légumes compostés). « Je mets en musique insectes, animaux et végétaux, qui sont tous interdépendants. La vie est une chaîne : si on coupe un maillon, on court à la catastrophe ». De ce travail harmonieux naissent
salade, laitue, carottes, gombo, patates douces, igname, bananes. Comme toutes les exploitations certifiés AB par écocert, celle d’Elin fait l’objet d’un contrôle stricte : un à trois contrôles par an, parfois inopinés.
Simone Magdeleine, Petit-Bourg : « Travailler pour l’émerveillement des clients ».
La production de Simone Magdeleine est certifiée AB (agriculture biologique) depuis 2008. Fait étonnant, malgré une petite parcelle de 2000m2, les produits de Simone sont très diversifiés. Elle excelle dans le maraîchage (laitue, roquette, courgette, poivron, choux, oignon rouge), et propose aussi de la volaille et les œufs que lui assurent 200 pondeuses. Pour Simone, travailler la terre selon le cahier des charges de l’agriculture biologique, « c’est un mode de vie, pas une mode. C’est pour la santé, pour le bien-être. D’où le nom de mon entreprise : « Panier bien-être » », explique-t-elle. « Je n’utilise aucun produit chimique ou de synthèse. Mes secrets : purin d’ortie et autres macérations, fumier de poule composté. Le paillage aussi, qui, en rete-nant l’humidité du sol, permet d’économiser l’eau ». Et puis Simone nous apprend ce retournement de paradigme, où plutôt que de les combattre, elle compose avec les petites bêtes. « Je nourris les mangoustes avec des œufs abimés, les fourmis avec des fruits, et elles me laissent tranquille le temps de conduire une culture à terme. Mille pattes et scolopendres sont chez moi des espèces protégées, car ils jouent un rôle majeur dans la décomposition de la matière organique ». On n’a rien sans rien, Simone le sait, elle travaille seule, ne compte plus ses heures, se couche souvent à minuit et se lève à 3h pour préparer les commandes. Récompensée ? « Voir l’émerveillement des clients, c’est ma plus grand récompense ».
Tatiana Depaz Severin, Lamentin : « Je produis du bio parce que je veux faire du bien ».
Ici tout se passe en intérieur, où hygrométrie et température sont sous haute surveillance. Ici, sagement disposées en bacs, germent des graines. Alfalfa, fenugrec, fenouil, radis pourpre ou rose, poireau, haricot mango, herbe de blé… Autant de pousses richissimes en oligoéléments et vitamines de tous types, sur lesquelles veillent les membres de la société familiale « Germe la vie ». Rien n’est laissé au hasard : eau d’arrosage filtrée au charbon actif et terreau biologique. Côté planning, « pas de Noël, pas de Nouvel an… Mais nous travaillons en famille, cela nous comble. Les enfants vident les bacs et arrosent les pousses », explique Tatiana. 400 boîtes de graines germées sont produites par semaine, dégageant un salaire. Elle produit bio parce qu’elle ne pourrait pas faire autrement. C’est simple, elle se sentirait tout simplement « incapable de produire des aliments néfastes pour la santé des gens », conclut Tatiana.
Vincent et Maryline Le Goff, Le Gosier : « Notre choix des matières premières est très sélectif ».
Vincent et Maryline proposent un pain artisanal travaillé à l’ancienne : façonnage à la main, fermentation de 24 heures, levain naturel, cuisson au feu de bois. La démarche éco-citoyenne en bonus : « nous utilisons le bois (énergie renouvelable), travaillons avec des producteurs artisanaux de sel et de farine, et privilégions au maximum les circuits courts », explique Vincent. Ainsi pain aux céréales, au petit épeautre, au sarrasin, au kamut ou à la châtaigne, pain complet et brioche au beurre de baratte sont-ils l’apanage du Fournil Bio.
Par Julie Clerc