Coline-Lee Toumson-Venite : carrière d’ultra-marin

Coline-Lee Toumson-Venite
Karollyne Videira Hubert

La rédaction fait un zoom sur des métiers d’ultramarins capables d’inspirer et d’encourager les nouvelles générations. Ce mois-ci, Coline-Lee Toumson-Venite, martinico-guadeloupéenne, s’est installée à Cotonou, au Bénin, il y a 3 ans, en tant que chargée de mission Arts et Culture du Président de la République du Bénin.

Propos recueillis par Karollyne Videira Hubert

Je considère les artistes comme les premiers ambassadeurs d’un peuple

Coline-Lee Toumson-Venite

Coline-Lee Toumson-Venite, quelles sont vos missions en tant que Chargée de mission du Président de la République du Bénin ? 

J’ai intégré l’équipe des chargés de mission de son Excellence Patrice Talon, Président de la République du Bénin, il y a deux ans. J’interviens dans le champ des affaires culturelles et artistiques. Le Bénin a fait de la culture, des arts et du patrimoine un des leviers clé de son développement et de son rayonnement. Les chargés de mission du chef de l’État interviennent en appui aux politiques publiques, en conseil stratégique, en veille stratégique, en soutien aux Agences ministérielles en charge de l’opérationnel, en coordination des projets phares. 

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Auparavant, vous aviez été directrice du centre culturel de rencontre Domaine de Fonds Saint-Jacques, en Martinique. Comment s’est construit votre engagement pour la culture ?

(sourire) Je porte en bandoulière cette citation d’Édouard Glissant qui est devenue chez moi un mantra : « Agis dans ton lieu, pense avec le Monde, le Monde s’y tient, il ressort de ton lieu ». Je suis le produit de cultures, et j’appartiens à une géographie « atlantique » qui connecte Europe, Afrique, Amériques. Nous sommes des êtres culturels, singulièrement nous, Caribéens, afro-descendants, situés à la confluence de plusieurs apports et produits d’une histoire culturelle et cultuelle riche, dense, complexe et fascinante. Travailler dans la culture me permet de parcourir tous ces mondes, d’explorer et de donner en partage d’autres récits, d’autres esthétiques méconnues ou caricaturées. Je me place tout simplement au service des artistes et de leur art. Je suis résolument attachée aux politiques publiques de la culture et à la culture comme un bien commun, une nécessité première pour nos sociétés caribéennes et africaines contemporaines. Je considère les artistes comme les premiers ambassadeurs d’un peuple, d’un pays, d’un être au Monde.

Quel moment marquant retenez-vous des deux années écoulées ? 

Imaginez-vous vous retrouver sur le tarmac de l’aéroport de Cotonou, en présence des Ministres des Affaires étrangères, du tourisme de la culture et des arts, en première ligne, et assister à l’arrivée des caisses contenants les « Trésors royaux du Bénin » (surnommés le “Trésor du Roi Béhanzin”) restitués par le Musée du Quai Branly et opérant leur « retour au pays natal » après 129 ans d’exil. J’étais là et j’ai assisté, émue, à l’atterrissage de l’avion-cargo et à l’arrivée de ces œuvres emblématiques sur la terre béninoise, c’était le 10 novembre 2021, à Cotonou, au Bénin : un souvenir impérissable.

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Après 10 années passées à Paris, vous étiez revenue vous installer en Martinique, pour finalement partir au Bénin. Comment s’est passée votre installation Coline-Lee Toumson-Venite ?

J’ai plaisir à dire que le Bénin est un appel des Ancêtres. Depuis adolescente, je me fais appeler « Amazone » et à 40 ans, j’ai rejoint la terre mythique des Agodjiés, les Amazones du Royaume du Danxomè, corps d’élite militaire féminin ! En fait, le jeu des affectations au sein du réseau culturel français à l’étranger m’a fléchée à la direction déléguée de l’Institut français du Bénin et, au bout d’un an, j’ai intégré l’équipe Culture du Président de la République du Bénin, pour mon plus grand bonheur et mon plus grand honneur ! Je suis de retour chaque année au pays, entre Martinique et Guadeloupe : « sé isi a lombrik mwen téré » mais je sens sur le continent africain et singulièrement l’Afrique subsaharienne, une dynamique irrésistible d’innovation, de création, de mouvement, et pour “l’artiviste” que je suis, c’est enthousiasmant et profondément inspirant.

BIO EXPRESS
Née à Fort-de-France, de père guadeloupéen et de mère martiniquaise, tous deux enseignants-chercheurs, Coline-Lee Toumson-Venite a été bercée dans un environnement foisonnant d’arts et de culture plaçant la Caraïbe et l’Afrique au centre de son imaginaire. Elle a effectué un parcours universitaire en Histoire et en Histoire de l’Art (Paris I Panthéon Sorbonne, Paris 8, EAC Paris Opéra) et s’est spécialisée dans la coopération artistique internationale et l’ingénierie culturelle. Au Bénin, elle collabore au développement de plusieurs projets artistiques et patrimoniaux phares, notamment au déploiement d’un important programme d’édification de Musées : Musée des Rois et des Amazones du Danxomè au sein des palais royaux d’Abomey, le Musée d’Art Contemporain de Cotonou, le Musée International du Vodun à Porto-Novo, ainsi que La Maison de la mémoire et de l’esclavage dans la cité historique de Ouidah.