Carrière d’Ultramarin : Cécile Fromont

Adolescente, Cécile Fromont rêvait de changer le monde, en s’engageant en politique. Aujourd’hui professeure d’Histoire de l’art à Harvard, elle apporte un nouveau regard sur les liens complexes entre l’Afrique et l’Europe à l’époque du commerce triangulaire

Cécile Fromont, professeure d'Histoire de l'art à Harvard
Marie Ozier-Lafontaine

De la Martinique à Harvard, un parcours d'excellence

Cécile Fromont, pourquoi avoir choisi d’enseigner aux États-Unis ? 

Au départ, mon projet était de faire de la politique, j’ai donc intégré Sciences Po Paris. Tout a basculé lorsque j’ai eu l’opportunité de participer à un échange universitaire aux États-Unis, à l’Université de Berkeley. Je me suis inscrite en Histoire de l’art, sujet qui attisait ma curiosité. Là, j’ai eu comme un déclic et à mon retour en France, j’ai cumulé deux cursus, un en Sciences politiques et un en Histoire de l’art, à l’école du Louvre. Je traversais la Seine tous les jours en courant pour suivre les cours des deux écoles ! Après un stage de fin d’études au Brésil, j’ai postulé pour un doctorat à Harvard, où je me suis spécialisée sur l’époque moderne, du 15e au 18e siècle. Après mon post-doctorat, je suis devenue professeure d’Histoire de l’art. L’art est un terrain d’études extraordinaire pour interroger autrement la construction des sociétés.

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Pourquoi avoir choisi de vous intéresser à la culture visuelle, matérielle et religieuse de l’Afrique à l’époque du commerce triangulaire ?

Cet angle de recherche permet de penser la relation de l’Europe à l’Afrique de manière différente, loin des discours simplistes, qui voudraient que l’Afrique n’ait pas contribué à l’Histoire ou qu’aucun document ne permettrait d’étudier son passé. Or l’étude des objets, des images, de l’art en général permet d’approfondir nos connaissances sur l’histoire de l’Afrique et de comprendre l’importance de sa contribution à la construction de l’Europe. Sans l’Afrique, l’Europe telle que nous la connaissons aujourd’hui n’existerait pas ! Les deux histoires sont étroitement liées et se sont coconstruites sur plusieurs siècles. J’ai écrit deux ouvrages pour restituer une vision plus complète de cette histoire, plus complexe qu’il n’y paraît.

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Sciences Po Paris, Berkeley, Yale, Harvard… D’où vient votre quête d’excellence Cécile Fromont ?

Mes parents et mes professeurs m’ont toujours encouragée à faire de mon mieux. Il y avait une vraie émulation dans ma famille, notamment avec mes frère et sœur qui étaient de bons élèves. En tant que benjamine, j’ai suivi cet exemple ! Et puis, quand j’étais enfant, les études étaient souvent perçues aux Antilles comme un moyen de réussir. Mon éducation m’a donné une rigueur et une discipline qui m’ont accompagnée tout au long de mon parcours. Aujourd’hui, je n’ai plus rien à prouver, et je travaille avec passion !

Mini bio 

Après l’obtention de son Bac au lycée de Bellevue, Cécile Fromont a étudié à Sciences Po Paris et à l’Université de Berkeley, avant d’obtenir son doctorat à Harvard. Professeure depuis une quinzaine d’années aux États-Unis, elle est l’autrice de deux ouvrages, L’art de la conversion : culture visuelle chrétienne dans le Royaume du Kongo, édité par Les Presses du Réel et Images on a Mission in Early Modern Kongo and Angola, édité par Penn State University Press. Actuellement en Italie pour son projet de recherche, elle s’attèle à terminer son 3ème ouvrage.