Avec la CODEM, la viande locale attire de plus en plus

La crise sociale qui se joue en Martinique fait écho à la nécessité de produire davantage en local. Ce constat n’a pas échappé à la CODEM (la Coopérative des éleveurs martiniquais) qui, après avoir restructuré la filière à son niveau, a mis en place les outils de son développement en améliorant notamment son image et en donnant les moyens à ses adhérents de relever les défis à venir.

Jean-Marc Ajanany, directeur général de la CODEM - Credit Photo Jean-Albert Coopmann
Thomas Thurar

Comment la CODEM a-t-elle évolué au cours des dernières années ?

Jean-Marc Ajanany, directeur général de la CODEM :
La Coopérative des éleveurs martiniquais a un peu plus de 40 ans d’existence. Ses missions sont, entre autres : l’accompagnement technique des éleveurs sur le terrain, la collecte des animaux, la découpe, la transformation et la commercialisation de la viande de bœuf, de mouton et de cabri au sein des grandes et moyennes surfaces, des boucheries artisanales, des cafés, hôtels et restaurants, de la restauration collective et enfin chez les particuliers.

Depuis 2024, nous travaillons également avec les éleveurs d’ovins et de caprins. C’est une opportunité pour nous car cela nous permet d’avoir un pôle ruminant au sein de la coopérative. Cette évolution est bénéfique pour la filière ovin, caprin qui était en déclin.

Quels chiffres faut-il retenir pour la CODEM ?

La CODEM, c’est environ 320 tonnes (t) de viande bovine produite par an sur un total de 687 t produites en Martinique. Nous avons 109 adhérents qui élèvent un peu moins de 7 000 bovins. En Martinique, on consomme plus de 19 000 t de viandes toutes espèces confondues pour une couverture d’un peu moins de 20 % pour la production locale.

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Quelle est votre réflexion sur la vie chère en Martinique ?

Nous sommes bien sûr soucieux de cette problématique qu’est la vie chère. Il nous paraît crucial que la production locale soit soutenue en mettant en place des actions, des stratégies puisqu’on parle d’autonomie alimentaire. Mais cela doit passer par la résolution de plusieurs problématiques que nous rencontrons. Vous avez d’abord la problématique du foncier puisqu’il faut organiser l’installation des jeunes ou les reprises d’activités. L’âge moyen des agriculteurs étant compris entre 55 et 60 ans, il faut leur permettre de céder leur activité dans de meilleures conditions. Nous sommes confrontés également à des délais relativement longs pour l’instruction des dossiers d’installation de jeunes agriculteurs. Nous n’échappons pas à la problématique de la Chlordécone présente sur certains terrains, toutefois, aujourd’hui, nous avons les outils permettant la décontamination des animaux présents sur les terrains à risque. Nous avons également une problématique liée à l’attaque de chiens errants et divagants à l’encontre des cheptels. Sans oublier le coût des intrants, du matériel agricole, des consommables, de l’essence…

Qu’avez-vous mis en place pour le développement de la filière ?

Nous travaillons sur la création de l’association foncière pastorale (AFP), c’est un outil de gestion du foncier privé et public, c’est la possibilité de mettre à disposition des terres de propriétaires en faveurs d’agriculteurs pour en avoir la jouissance pour le pâturage ou la fauche d’herbe pour l’alimentation des animaux. La première association devrait voir le jour au 1er trimestre 2025. Nous travaillons sur la formation des agriculteurs, la CODEM a créé son propre centre, le COFERM (Centre opérationnel de formation des éleveurs de la région Martinique) c’est un outil qui permet notamment aux agriculteurs et aux professionnels de l’agro-transformation d’augmenter leur productivité et leur compétence. 11 bouchers ont été formés en Martinique en 2024 grâce à cette stratégie. Nous avons créé également un Groupement d’employeur agricole de Martinique (GEAM). Ce dispositif va nous permettre de mettre à disposition 12 ouvriers polyvalents d’élevage et par conséquent, de mutualiser de la main d’œuvre agricole qualifiée sur les exploitations du territoire. Les premiers recrutements vont démarrer en décembre.

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En 2017, vous aviez également ouvert le Comptoir des Viandes, une boucherie coopérative

Oui, elle nous permet de valoriser le savoir-faire des bouchers traditionnels et les viandes locales. C’est du 100 % frais et 100 % « péyi ». On y trouve du bovin, du caprin, du porc, de la volaille et depuis peu de l’autruche élevée ici. Le Comptoir des Viandes a aussi un espace épicerie fine avec des produits alimentaires transformés qui illustrent le savoir-faire des producteurs locaux. La boutique est située à Bois Carré au Lamentin. Depuis 2023, nous avons ouvert, via un partenariat avec le Chef Ducteil, un espace restauration pour les gourmands. Nous prévoyons d’ouvrir un autre Comptoir des Viandes au 1er semestre 2025.

Puis, tout au long de l’année, à travers les « Jeudis de l’élevage », la CODEM a multiplié aussi les journées techniques et les réunions d’information entre les adhérents et les partenaires afin de renforcer les réseaux, les connaissances et de créer de nouvelles opportunités de collaboration entre éleveurs et organismes.

CODEM
ZI Place d’armes
97232 LE LAMENTIN