Airaro, un vent de fraîcheur dans le milieu de l’énergie

L’un est originaire de Guadeloupe, l’autre de l’Hexagone. Installés depuis plus de vingt ans en Polynésie française, David Wary et Jean Hourçourigaray ont implanté la technologie du SWAC à travers leur société, Airaro.

David Wary dans le local technique du SWAC du Centre hospitalier de Polynésie française. Ingénieur maritimeet co-fondateur de la société Airaro, il a réalisé toute la conception technique du SWAC.
Vaikehu Shan

L’un est originaire de Guadeloupe, l’autre de l’Hexagone. Installés depuis plus de vingt ans en Polynésie française, David Wary et Jean Hourçourigaray ont implanté la technologie du SWAC(1) à travers leur société, Airaro.

Par Vaikehu Shan / Hans Lucas

Les premiers projets de transition énergétique

L’histoire d’Airaro commence avec l’arrivée de ses deux « pères fondateurs » en Polynésie. En 2001, David Wary, alors étudiant à l’ESIM (2), effectue son stage de fin d’études en construction maritime à Tahiti et obtient, par la suite, son diplôme d’ingénieur en génie maritime. Trois ans plus tard, Jean Hourçourigaray, diplômé de l’INSEEC U, pose à son tour ses valises après des expériences professionnelles de commissariat aux comptes, de conseil et de développement de start-up de l’Internet.

David et Jean alternent chacun leurs activités entre secteur privé et public, tout en travaillant, par ailleurs, sur les premiers projets de transition énergétique polynésiens, en particulier les SWAC réalisés dans des hôtels du groupe TBSA : celui de l’InterContinental Bora Bora Thalasso & Spa — premier SWAC commercial au monde mis en service en 2006 — et celui du Brando à Tetiaroa, mis en service en 2011. Le futur binôme se retrouve sur un autre projet de SWAC à Tahiti, qui n’a finalement pas vu le jour, avant de travailler à nouveau ensemble sur celui du Centre hospitalier de la Polynésie française, sur lequel David avait commencé les études en 2006.

Le SWAC de l’hôpital financé

Le 12 décembre 2012, la levée de fonds de presque trois milliards de francs pacifiques (plus de 25 millions d’euros) pour le SWAC du CHPF s’achève avec la participation de l’AFD et de la BEI à hauteur de 7,5 millions d’euros chacun. « C’est un risque technologique qu’a couvert l’AFD parce qu’il y avait déjà eu des résultats qui marchaient. Le plan de financement était propre et la technique était bien faite. »

Airaro au service de l’intérêt général

David et Jean se rejoignent sur leurs valeurs et la volonté de continuer sur des projets de transition énergétique. « On est immigrés ici. On n’a pas d’autre ambition que de contribuer à préserver ce pays qui est le paradis sur Terre. » Après le départ de Jean du gouvernement, David et lui créent la société Airaro, en 2013. « Airaro a pour ambition, depuis le début, de peser sur la transition énergétique de la Polynésie. » En 2016, la société devient AMOA (Assistance à maîtrise d’ouvrage) pour le Service des énergies de Polynésie française sur le projet du SWAC du CHPF. « L’hôpital consommait plus d’électricité qu’il n’achetait de médicaments, hors service oncologie. On a vraiment axé notre entreprise pour que ce dossier serve l’intérêt général et le bien public. »

Entre 2012 et 2017, le duo travaille également en tant que consultants de Naval Group (ex-DCNS) sur la technologie de l’ETM (Énergie thermique des mers), pour un projet qui sera finalement avorté en 2017.

Cofondateur de la société Airaro, Jean Hourcourigaray a réalisé tout le montage financier du SWAC du Centre hospitalier
Cofondateur de la société Airaro, Jean Hourcourigaray
a réalisé tout le montage financier du SWAC
du Centre hospitalier

Le SWAC du CHPF : une référence

Depuis le 8 juillet 2022, la climatisation du CHPF est assurée à 100 % par le SWAC conçu par Airaro. Il reste, à ce jour, la plus grande infrastructure au monde de ce type, et permet d’économiser 2 % de la consommation totale du territoire en énergie, soit 5 000 tonnes de CO2 par an. « Quantitativement et financièrement, le projet est posé exactement dans les conditions décrites aux banques en 2012. C’était notre engagement. Et c’est une référence qui devient indiscutable de la part de tout le monde. »

Aujourd’hui, David et Jean sont reconnus par l’ADEME et la CRE (Commission de régulation de l’énergie) comme « les seuls sachants » en termes de SWAC. « Il n’y a plus de concurrent crédible. On a pris le risque de le faire. » Ils confient, humblement, que c’est aussi « en partie lié au contexte polynésien : on est dans les pires conditions en opérationnel et on a eu l’opportunité d’intervenir sur tous les niveaux. Cela nous a permis d’avoir une connaissance intégrale de tout le process. »

Désormais, leurs ambitions sont de lever des fonds pour recruter de nouveau (3). « On a déjà reçu douze stagiaires de Polytechnique. On aimerait sécuriser des gens comme ça. » Les fonds et l’équipe aideraient à mener plusieurs projets en Polynésie et dans le monde entier. « On a déjà le soutien de l’ADEME Investissement et de la SOFIDEP (Société de financement du développement de la Polynésie française), et on cherche un partenaire privé pour faire des SWAC à l’international avec la Banque mondiale, dans les DOM, et le premier ETM en Polynésie, sur l’île de Tahiti, avec l’accord du gouvernement de la Polynésie. »

(1) Sea Water Air Conditioning : système de climatisation à l’eau de mer.
(2) École supérieure d’ingénieurs de Marseille.
(3) La pandémie de Covid-19 a forcé David et Jean à réduire la voilure d’Airaro en se séparant du reste de l’équipe constituée.


Retrouvez cet article dans le hors-série Outre-mer Innovation.